Avec le projet de déploiement de cars express en Île-de-France pour relier les zones d'habitat et les zones d'emploi ou de mass transit, François Durovray, président du Conseil départemental de l'Essonne, et membre d'Acteurs du Grand Paris, qui a piloté la démarche pour Île-de-France Mobilités, projette de décarboner la route en proposant une alternative moins coûteuse aux automobilistes. Ainsi, 45 nouvelles lignes pourraient voir le jour d'ici à 2030, tandis que celles existantes seront modernisées.
Quelle est l’offre actuelle de cars express en Île-de-France ?
Une cinquantaine de lignes ont ce label, mais seulement une dizaine sont réellement « express », dont les deux emblématiques – Mantes-la-Jolie – La Défense et Dourdan – Massy –, car elles offrent une vitesse commerciale élevée sur une longue distance, ont peu d’arrêts et disposent d’aménagements adaptés, dont des voies réservées.
Pourquoi développer les cars express dans la région ?
Si je me suis attaqué à ce sujet, c’est qu’il est illusoire de desservir la grande couronne avec des métros ou des tramways, c’est une hérésie économique et les flux ne sont pas suffisants. De plus, la route doit se transformer et se décarboner, avec un changement des motorisations et une massification des déplacements, c’est-à-dire plus de monde dans moins de véhicules. L’objectif de ces cars express est de relier des lieux d’habitat aux zones d’emploi ou à des sites de mass transit.
Vous êtes-vous inspiré d’exemples français et étrangers ?
J’ai voulu comprendre pourquoi il n’y avait pas beaucoup plus de lignes en Île-de-France et m’inspirer des lieux où ça marche. La situation de Madrid est exceptionnelle, où a été développé un réseau de cars en même temps que la ligne 6 de métro qui fait le tour de la ville. Des gares routières souterraines sont donc directement connectées aux stations de métro, ce que nous n’avons pas fait avec le Grand Paris Express. Je suis aussi allé à Bordeaux et Aix-Marseille où ce type de transport fonctionne très bien grâce à des aménagements très simples de voies réservées sur les autoroutes qui permettent de garantir les temps de parcours sans trop de dépenses.
Quels principes ont été retenus pour les nouvelles lignes franciliennes ?
Nous avons identifié les flux qui regroupent suffisamment de trajets domicile-travail. L’ambition est de construire la promesse, pour ceux qui vont au travail en voiture, de passer d’un temps de transport contraint à un temps utile. Pour cela, l’offre aux personnes qui ont des trajets longs et polluants doit disposer d’une haute fréquence, de temps de parcours garantis grâce notamment à des voies réservées, de l’assurance d’avoir un fauteuil, le Wifi, et des ports de recharge USB. L’autre promesse est de baisser le coût de la mobilité, au niveau du pass Navigo, car les déplacements quotidiens en voiture peuvent représenter jusqu’à 500 euros par mois.
Quel plan de déploiement est prévu pour ces lignes ?
Nous prévoyons de développer 45 lignes de cars express dans les quatre ans à venir. La moitié sans travaux préalables, l’autre moitié nécessitant des travaux. Depuis le vote du projet par Île-de-France Mobilités en novembre 2023, nous travaillons avec les collectivités pour identifier les 23 lignes de la première phase. Les premières pourraient être créées à partir de la rentrée 2024 avec le réaménagement des lignes existantes. Début 2025, une dizaine de nouvelles lignes verra ensuite le jour.
Cette offre s’appuie-t-elle aussi sur l’existence de pôles multimodaux ?
C’est indispensable. Une des raisons aujourd’hui pour lesquelles l’offre de cars n’est pas fonctionnelle est la complexité administrative de l’organisation territoriale, avec différents acteurs qui sont propriétaires des voiries et qui développent l’offre de transport. De ce fait, j’ai proposé qu’Île-de- France Mobilités finance la création de ces pôles multimodaux pour le compte de collectivités, voire même en assure la maîtrise d’ouvrage. Environ 60 gares routières sont à réaliser, qui pourront dans un premier temps être assez sommaires, mais devront ensuite offrir un lieu fermé, sécurisé, chauffé où l’on peut attendre son bus avec du Wifi ou une offre commerciale. Ces gares devront constituer des hubs vers lesquels les habitants vont se plugger grâce à des parkings vélos sécurisés et des places de stationnement en nombre. La gare la plus récente de ce type est celle de Longvilliers (Yvelines), inaugurée fin 2020 et dont le parking est déjà plein.
Quel effet ces cars express pourraient-ils avoir sur la circulation routière ?
À terme, avec la mise en place d’une centaine de lignes, l’objectif est de passer de 90 000 usagers par jour actuellement à 150 000. Les 45 premières lignes pourraient alors permettre d’éliminer la circulation de 110 000 voitures. Les 500 000 Franciliens qui font plus de 50 kilomètres en voiture pour leurs trajets domicile-travail sont la cible prioritaire des cars express.
QUEL FINANCEMENT ?
Afin d’assurer la mise en place du projet de cars express en Île-de-France, des crédits pour les aménagements (de 150 à 200 millions d’euros d’ici à 2030) et l’achat de 200 autocars (70 millions d’euros) sont fléchés dans le contrat de plan État-Région. Le fonctionnement, estimé à 70 millions d’euros annuels, sera assuré par Île-de-France Mobilités.
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